Combien de fois avez-vous entendu ou pensé cette phrase : “ce n’est qu’une question de volonté” ? Lorsqu’il s’agit de perte de poids, elle revient comme un refrain bien connu – un refrain qui fait mal.
Sous ses airs de “bon conseil”, cette phrase est en réalité une injonction violente, particulièrement envers les femmes. Elle résume à elle seule tout un système de pressions sociales, de jugements sur les corps, et d’attentes irréalistes.
Quand le poids devient une affaire publique
On commente les corps des femmes dès l’enfance. Trop ronde, pas assez tonique, il faudrait “faire attention”, “se reprendre”, “se motiver”. Peu importe leur histoire, leur santé, leur contexte de vie : le message reste le même. Si tu veux, tu peux. Et si tu n’y arrives pas, c’est que tu ne veux pas vraiment.

leCe discours ignore complètement la complexité du rapport à l’alimentation et au corps, en particulier chez celles qui ont grandi avec ces injonctions. Il balaie d’un revers de main les mécanismes psychologiques, les émotions, les traumas parfois, qui influencent profondément notre manière de manger.
L’illusion de la volonté
Oui, la volonté existe. Mais elle ne flotte pas dans un vide. Et résumer la perte de poids juste à une question de volonté, c’est bien mal connaître les différentes sources possibles de prise de poids : un métabolisme ralenti, un problème hormonal, une charge mentale élevée, un stress chronique, un sommeil troublé, des émotions difficiles à accueillir, une image et estime de soi dégradées, un passé traumatisant… Et on sait aujourd’hui, grâce à la psychologie et aux neurosciences, que la volonté n’est pas une ressource infinie. Elle s’épuise. Et elle ne peut pas tout.
Les conséquences invisibles
Cette phrase a un coût. Un coût psychique, émotionnel, parfois physique.
Elle génère :
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De la honte (« Je ne suis pas assez forte »),
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De la culpabilité (« Je devrais y arriver »),
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Du découragement (« Je n’y arriverai jamais »),
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Et souvent, de la restriction suivie de compulsions, dans un cycle sans fin.
Certaines femmes finissent par croire qu’elles sont “cassées”, qu’elles ont un “problème” avec la nourriture ou avec elles-mêmes et développent une relation troublée avec l’alimentation et leur image. Mais le problème est rarement la nutrition en elle-même, c’est souvent bien plus profond.
Ce qu’on ne dit pas assez
Le rapport au poids est intimement lié à l’histoire personnelle. Et ce n’est pas une faiblesse. C’est humain.
Ce qui aide vraiment, c’est de comprendre, d’accueillir, d’apaiser. C’est de travailler sur la relation à soi, à son corps, à son assiette. Avec douceur, avec respect, avec patience.
Et surtout : en sortant du discours de la faute. Car une chose est sûre, c’est que s’il y a bien d’une chose dont ne manque pas les femmes qui ont enchaîné les régimes les plus durs qui soit toute leur vie, c’est de volonté. Elles ont la volonté d’y retourner, et la volonté de s’en sortir. La volonté de développer une relation sereine avec l’alimentation.
Une autre voie est possible
Je crois fermement que le changement ne vient pas de la pression, mais de la compréhension.
Accompagner les femmes à retrouver une relation apaisée à la nourriture, c’est d’abord écouter leur histoire. C’est déconstruire les injonctions, remettre du sens là où il n’y avait que des règles strictes.
Non, ce n’est pas qu’une question de volonté. C’est une question de regard. Sur soi, sur son histoire, sur le monde qui nous entoure.
Et peut-être qu’il est temps qu’on change ce regard.